Au commencement, il y a cet abandon, ce désir d’aller là où l’on se sent porté, comme happé irrésistiblement vers un ailleurs que l’on aimerait croire réconfortant et familier. Alors, quand Anne Eppler évoque le hasard, comme point de départ d’un acte photographique, en décidant d’aborder quelqu’un dans la rue ou de frapper à une porte pour parler avec un anonyme, il semblerait que cela soit davantage le fruit d’une perception particulièrement vigilante et aiguisée. Comme si l’autre pouvait détenir une part de soi et qu’il faille l’approcher, le questionner, pour vérifier ensemble des éléments communs, une parenté possible, qui en ferait un des maillons d’une généalogie de cœur […]
Parler longuement, se revoir régulièrement, puis prendre des images comme si l’on pouvait garder un peu de ce temps si précieux qui s’échappe déjà. L’appareil se fait oublier. Garder espoir et faire néanmoins confiance à ce qui va se déposer sur la pellicule. Puis l’image se fait jour, respirant autant par ce qu’elle nous offre que dans ce hors champ si vaste où toute parole prononcée, restera pourtant muette pour le spectateur […]
Dans une forme de dérive, d’errance, chères aussi bien à Guy Debord qu’à Raymond Depardon, Anne Eppler construit les conditions d’une rencontre et entrevoit avec finesse l’espoir d’une image qui en portera longuement la trace puisque désormais tous ces protagonistes font partie de son cercle rapproché.
Pierre-Yves Magerand
Du mardi au samedi de 13h à 18h
Vernissage --> jeudi 16 mai à 18h, abc
Visite commentée --> jeudi 23 mai à 18h, abc